Le rappeur camerounais, arrêté le 26 janvier dernier après avoir participé à une manifestation de l’opposition, est toujours en prison à Yaoundé. Ses collègues artistes et activistes le soutiennent, et ont décidé de le faire savoir.
Six mois. Voici la moitié d’une année que Gaston Abe Abe, alias le général Valsero a été arrêté. Ce jour-là, il avait participé à une manifestation de l’opposition à Yaoundé, mais c’est peu après, alors qu’il était en ville avec son enfant, qu’il a été emmené par les policiers. Depuis, les nouvelles de lui sont rares, et ne filtrent qu’à travers les quelques proches qui parviennent à en avoir, ce qui devient plus difficile encore depuis la toute récente mutinerie dans la prison de Kondengui où il est détenu (qui compte 5000 prisonniers pour 800 places). Rappeur engagé, Valsero dénonce depuis une vingtaine d’années les turpitudes du régime au pouvoir au Cameroun. Paul Biya y est président depuis 1982, et son parti le RDPC y règne en maître. C’est d’ailleurs à lui que Valsero s’adressait dans un titre qui fit alors beaucoup de bruit, « Lettre au Président ».
Faute de réponse, il enchaînait « Réponds« ! Et depuis lors poursuivait inlassablement sa dénonciation du manque de perspectives dans un Cameroun qui a oublié sa jeunesse, pourtant ultra majoritaire. Mais c’est, semble-t-il, surtout son engagement en politique qui lui a valu les foudres du pouvoir, puisqu’il a soutenu, lors de l’élection présidentielle d’octobre 2018, le candidat principal de l’opposition, Maurice Kamto, qui lui aussi a été arrêté le 26 janvier, et avec lui 130 militants de l’opposition ou de la société civile.
Huit chefs d’accusation pèsent sur ces 130 prisonniers politiques : Hostilité contre la patrie, Incitation à l’insurrection, Rébellion en groupe, Insurrection, Attroupement, Trouble à l’ordre public, Association de malfaiteurs, Complicité. Ils sont en attente de jugement. Ils encourent la peine de mort.
Le 11 juillet dernier, c’est le tribunal militaire de Yaoundé qui s’est déclaré compétent (sic) pour les juger. Sans doute, et parce que le second degré n’est pas la chose la mieux partagée du monde, aura-t-il pris au pied de la lettre le surnom du rappeur, « Général Valsero ».
Depuis quelques semaines, Laurène Lepeytre, réalisatrice française qui avait tourné un documentaire sur Valsero, se mobilise pour qu’on ne l’oublie pas. À découvrir ci-dessus.
Tiken Jah Fakoly, Blick Bassy, Smockey, Lexxus Legal, Elom20ce, Fadel Baro et d’autres encore, artistes engagés, hommes de culture ou membres des mouvements citoyens ont enregistré un message de soutien au rappeur emprisonné.
Amnesty International a également lancé une pétition pour demander sa libération, ainsi que celle des 130 autres personnes arrêtées en même temps que lui.
Quant à Valsero, en prison après avoir comme Fela, chanté les « Zombies« (pour parler des citoyens endormis par le système), son parcours ressemble de plus à celui de son aîné nigérian.